Histoire et patrimoine

Le territoire de l’ancienne commune de La Reid
est riche d’histoire et de patrimoine !

Pour en savoir plus (avant de lire tout ce qui suit 🙂 !), vous pouvez vous rendre sur la page du site Spa Réalités, qui vous donnera déjà une bonne idée de notre si beau coin.

Nous reprenons ci-dessous le texte que notre co-Reidois, Jean-Luc Seret, de Desnié, a brillamment rédigé pour la revue Theux, mon pays 2015-2016, avec quelques mises à jour.

LA REID

L’ancienne commune de La Reid, qui existait avant les fusions des communes de 1976, s’étendait du nord au sud depuis le parc Forestia jusqu’à Bronromme ; d’est en ouest depuis la vallée de Tolifaz jusqu’à Hautregard.

Les villages et hameaux principaux de l’ex-commune de La Reid étaient : Becco, Desnié, Winamplanche, Marteau, Bronromme, Hestroumont, Hautregard, Queue-du-Bois, Belva, Vertbuisson et Jehoster.

LA REID (Reid, de le ree, delle ré, rey, dellere, ...) : centre administratif de l’ex-commune. L’origine du nom est incertaine. La première trace du nom daterait de 1323 (reid ou de le reie) dans des registres de la cour de justice de Theux. Albert Carnoy évoque « rayi » pour une terre défrichée. Louis Remacle, de La Gleize, évoquait le «  » ou « reye » pour le rayon de miel et par extension la ruche ou un centre apicole. Le nom de famille « REID » fréquemment utilisé aux Etats-Unis et au Royaume-Uni signifierait selon son origine « la clairière » ou « celui qui habitait à l’orée du bois », mais en Ecosse, Reid (ou plutôt Read) désigne celui qui a les cheveux rouges, un rouquin. REID est un quartier de Canberra et une circonscription à Sidney en Australie. Le glacier REID est un glacier d’Alaska.

Pays de cultivateurs et d’apiculteurs, de cueilleurs et d’artisans, La Reid a vécu aussi la révolution industrielle. Depuis le moyen-âge, on y extrayait le minerai de fer pour le travailler à la forge, mais surtout le long des cours d’eau : le Wayai, le ruisseau de Winamplanche et le Turon. Mais l’industrie du clou avait pris beaucoup d’importance au XVIIème siècle. De 1835 jusqu’en 1875 environ, ce sont les grands exploitants industriels du bassin liégeois qui se sont déplacés à La Reid afin d’extraire le minerai. Les « bûres » se trouvaient principalement à Hestroumont, Halleux et Queue-du-Bois. Il y a eu environ simultanément une trentaine de puits exploités à la même époque que celle du site du Rocheux au-dessus de Theux. C’est une histoire peu connue des Reidois.

Avant la première guerre mondiale, La Reid était traversée en tout sens par les botteresses, porteuses de la hotte chargée d’eau de Spa, de messages, de denrées ou de charbon. Elles démarraient à Spa par la « Voie de La Reid » ou « Sentier des Botteresses », pour se diriger vers Winamplanche ou Marteau, puis les Combles, le Hour, chemin du Hestay et quittaient la commune par l’emplacement actuel du cimetière de La Reid afin de prendre la direction de Liège. Elles ont disparu avec l’arrivée des engins motorisés.

L’exploitation de la ligne de chemin de fer Pepinster-Spa par la gare de La Reid a débuté en 1854. Cette ligne était principalement utilisée pour le transport du bois reidois, du charbon luxembourgeois et les eaux de Spa. Néanmoins cette ligne a déplacé aussi plusieurs générations d’ouvriers, de touristes, de militaires et d’artisans qui se rendaient sur les marchés. Le bâtiment de la gare construit en 1896 fut détruit en 1976 parce que la ligne était devenue improductive car elle ne concernait plus que le trafic de personnes.

Dans les années 1950 avec les maïorats de Pierre THOREZ et de Jean GILLET, la commune était reconnue une des plus riches de Belgique, grâce à la vente des bois de feuillus et résineux plantés sur les terrains communaux. Le bourgmestre Jean GILLET (1918-2011 : deux maïorats reidois et theutois de 1961 à 1987) aura eu l’heureuse initiative, grâce aux bénéfices de la vente de bois, de retracer et macadamiser les routes et grands chemins forestiers de la commune.

La vie sociale moderne de La Reid s’est surtout développée avec la création du chemin de fer, grâce à la richesse touristique de la ville de Spa et à l’exploitation de la richesse naturelle du sol (fruits sauvages, miel, forêts, élevage, …). C’est à cette époque qu’a été décidée la construction des fontaines (1856) mais aussi le retour de la foire Saint-Fiacre (1869) ; l’harmonie « La Concorde », première fanfare de La Reid (1886) ; « La Ruche Spadoise » (1896) et d’autres associations sportives et culturelles, avant la Grande Guerre.

Après le deuxième conflit, La Reid a pu compter sur l’initiative de ses habitants pour la création du club de football en 1945 (Stella La Reid) mais dissous en 1956, et reconstitué en 1971 sous le maïorat de Jean GILLET. Cette association sportive n’existe plus depuis quelques années. Le Syndicat d’Initiative a été créé en 1947 à l’initiative du bourgmestre Georges DRÈZE (un parc porte son nom). Le comité « La Jeunesse Reidoise », issu de différents mouvements formés après la guerre, fut transformée en ASBL en 1958. Son implication dans la vie culturelle reidoise a été essentielle dans tous les événements festifs grâce à ses membres actifs.

Le principal moteur d’un renouveau reidois fut l’installation de l’école d’agriculture en 1953 sous le maïorat de Pierre THOREZ. Si les premiers locaux étaient au centre de La Reid, l’école actuelle de la rue du Canada fut inaugurée en 1972. Cette immense école possède les meilleurs atouts pour des étudiants qui veulent réussir dans les métiers agricoles, sylvicoles et équestres… protégés par l’un des patrons de La Reid, saint Fiacre, patron des jardiniers et des horticulteurs.

C’est le seul site professionnel durable de l’ex-commune de la Reid. L’origine du nom « Canada » n’est pas certifiée historiquement. Citons les plus plausibles : en 1905, les édiles communaux reidois visitaient la grande exposition à Liège. Devant le stand du Canada et ses espaces sauvages, ils ont pu s’exclamer : Nous aussi, on a le Canada à So lès Combes ! En 1906, la commune de La Reid louait 19 hectares pendant 27 ans à So lès Combes afin que les plus démunis puissent profiter d’un potager providentiel. Les récoltes furent très productives surtout en crompîres ! Peut-être ressemblaient-elles aux topinambours ou encore étaient-ce réellement des topinambours. Les vieilles histoires disent aussi que ce sont des soldats canadiens à la fin de la guerre ‘14-‘18, qui ont initié certains Reidois à la culture de la pomme de terre (ou topinambours) sur un sol pauvre. Cette culture aurait sauvé de la famine une partie de la population. C’est pour la raison qu’une croix a été plantée par Victor GROSJEAN (1885-1974) après 1921, après la désaffectation de l’ancien cimetière de La Reid, avec les mots gravés « Canada 1906 ».

Les Reidois disaient aussi pendant la récolte On va aux Canadas alors qu’ils quittaient le village avec houe et paniers. Toutes ces histoires ont toutes un fond de vérité, elles sont sans doute toutes complémentaires les unes des autres !

Deux fleurons touristiques sont mis en évidence sur le territoire de l’ex-commune de La Reid :

LA CHARMILLE : en 1878, Michel NYS, propriétaire du domaine de Haut-Marais, aménageait son domaine en y plaçant des piliers de pierre de taille aux différentes entrées de ses terres. En 1885, Victor Charlemagne THOREZ et Mathieu COMPÈRE, cantonniers, plantaient une charmille de 4700 plants entre le hameau de Vertbuisson et Haut-Marais afin d’agrémenter le domaine de NYS. C’est le forgeron local, Adolphe CORTIN, qui a cintré les arceaux métalliques qui forment toujours l’ossature du tunnel de la charmille. Si on cite actuellement la longueur de 573 mètres pour cette plantation, elle était d’environ 1000 mètres en 1940. Cette partie manquante, endommagée par les chars allemands en mai 1940, ne fut pas replantée après le conflit. Cette allée (ou drève) de l’ex-charmille détruite fut nommée en 1995 « Drève THOREZ » à la mémoire de Pierre THOREZ (1893-1974), original bourgmestre de La Reid (de 1921 à 1932 et de 1953 à 1959). Il fut, à 28 ans, le plus jeune bourgmestre de Belgique. Le pittoresque de ce personnage est toujours dans la mémoire des Reidois.

Cette charmille, tombée dans l’oubli et laissée à l’abandon avant 1975, a été classée en 1979 et restaurée entièrement avant 1985. C’est grâce à l’entretien assidu des étudiants de l’école de la rue du Canada qu’elle est citée comme une des plus belles charmilles d’Europe (une brochure intitulée Inventaire des promenades couvertes d’Europe, publiée par le Syndicat d’Initiative en 1997, est disponible au bureau du SI).

Le PARC FORESTIA : en 1970, un investisseur privé allemand, M. REICHE prenait l’initiative d’acheter des pâtures afin de créer une réserve de gibier. REICHE est le même qui a fait tracer le Parc Ménobu. Si la vocation première était l’élevage du grand gibier destiné à la consommation, il était aussi devenu un parc ouvert aux promeneurs curieux d’approcher les grands cerfs. Mais après une quinzaine d’années, ce parc n’était plus rentable. Cette activité fut reprise par les autorités communales de Theux en 1987, qui créaient à cette occasion la Régie communale du « Parc à gibier ». Les touristes pouvaient admirer des loups, ours, bisons et autres animaux dans leurs enclos. En 2001, ce parc attractif redevenait privé et prit le nom de « Parc animalier ». En 2004, le parc cherche à se diversifier. Les parcours aventures sont construits dans le bois voisin et cette partie acrobatique s’appelle désormais « FORESTIA ».

L’adresse du Parc « rue Fond Marie » est particulière. Avant la création du parc, deux petites maisons existaient en contrebas sur l’ancien chemin de Sougné à Jevoumont, l’actuelle rue Fond Marie. Marie Servaty était l’épouse de Jean Joseph Lejeune (1823-1877) et sa voisine était Marie Hurlet épouse de Jacques Servaty (1830-1884). Après un nouveau tracé de la voie, celle-ci fut appelé « Rue du Fond des deux Marie » et puis « rue Fond Marie ». Après un incendie, il ne restait qu’une maison qui a été mise à l’écart en 1972 par la création du parc à gibier et par le nouveau tracé définitif de la voie.

Un troisième lieu n’est pas à oublier : la MJC ou l’Asbl Maison des Jeunes et de la Culture de La Reid, indépendante et pluraliste, reconnue par la Communauté française. C’est aussi un Centre d’Expression et de Créativité, reconnu par le Service des Affaires Culturelles de la province de Liège, soutenu par la commune de Theux et la Région wallonne.

Les stages organisés par la MJC touchent les jeunes de 3 à 16 ans mais aussi des adultes. Créée en 1970, en parallèle avec l’école d’agriculture, l’ASBL est installée place du Marais depuis 1978. Des centaines de jeunes et toujours jeunes participent aux différentes activités.

La Foire Saint-Fiacre se déroule toujours le dernier dimanche du mois d’août ; jusqu’en 2016, elle était organisée par le Syndicat d’initiative de La Reid, qui propose aussi une promenade guidée mensuelle et d’autres activités annuelles (concours de façades fleuries, par exemple) et édite, plusieurs fois par an, une revue distribuée gratuitement dans tous les foyers de l’ex-commune de La Reid, revue intitulée La Reid’Action.

La Reid vit aussi grâce à la vitalité de sa jeunesse scolarisée dans le village. Quelques commerces subsistent au centre de La Reid. La course cycliste Liège-Bastogne-Liège passe toutes les années par l’ex-commune de La Reid.

Le personnage le plus illustre et le plus populaire de La Reid est toujours le géant BIHIN. Ce personnage réel fut une vedette du show-business européen et nord-américain. Jean Antoine BIHIN est né en décembre 1805 à La Reid, dans ce qui était le département de l’Ourthe de l’Empire français. Adulte, il mesurait, dit-on, deux mètres quarante-trois et pesait environ 158 kilos ! Après un déménagement familial à Verviers en 1834, Antoine devint une célébrité… colossale grâce à sa taille. Il parcourut toute l’Europe avant d’embarquer pour l’Amérique en 1840 sur le navire « British Queen » qui reliait Le Havre et New York. Jeune, il était tailleur de pierres comme son grand-père, puis tambour-major à l’armée, abatteur, cocher ; il fut aussi vedette de cirque, acteur, comédien, dompteur et se maria trois fois ! Après un court passage à Dolhain en 1848, il retourna définitivement au Canada, puis aux États-Unis, où il mourut le 25 octobre 1873, à 68 ans. Il est enterré dans le cimetière Greenwood à New York. Bel homme, foncièrement bon, il était père de quatre enfants, riche et très admiré de la gent féminine. Aujourd’hui on le traiterait de people artiste surmédiatisé…

D’autres personnages :

  • Rachel BOUFFA, résistante reidoise (1882-1945) dénoncée puis déportée à Ravensbrück où elle mourut. Elle habitait la Ferme de la Chapelle à Jehoster La Reid.
  • Jean DEBY secrétaire communal pendant la seconde guerre et cerveau d’un groupe de résistance à La Reid.
  • André ANDRIES, de Vertbuisson, auteur de nombreux ouvrages et recherches sur la Reid. Magistrat, écrivain, président d’honneur de la Société internationale de Droit militaire et de Droit de la guerre, André Andries a reçu en 2006 le prix Tectis, qui récompense les Theutois qui ont œuvré pour le patrimoine et l’histoire de leur commune.
  • Monique FRANCE a vécu à La Reid et a appris les premiers rudiments musicaux avec la fanfare locale. Elle est toujours la Reine de l’accordéon, championne du monde en 1964, animant les groupes « Monique et les Mélodies », « Monique and the Modernys », elle a animé tous les événements festifs de la région. En 2013, elle fêtait ses 50 années d’orchestre. Elle est toujours la dame de l’accordéon !
  • Jean-Marie REMACLE, de La Reid, métallurgiste, écrivain, chroniqueur et collectionneur, amoureux du wallon de Liège et des traditions, écrit en wallon depuis de nombreuses années ses mémoires ainsi que des articles dans les revues des Syndicats d’initiative theutois et reidois.
  • Le général Dwight David EISENHOWER, dit Ike (1890-1969), est passé en 1945 dans le domaine du Haut-Marais qui fut un hôpital pour les troupes alliées. Il fut le 34ème président des Etats-Unis, de 1953 jusqu’en 1961, après TRUMAN et avant KENNEDY. Son fils, John EISENHOWER (1922-…), ambassadeur des Etats-Unis à Bruxelles, a loué une maison à Jehoster au-dessus de La Reid de 1969 à 1971. Il était accompagné de Mamie, sa mère, épouse de feu Dwight EISENHOWER et ex-première dame des Etats-Unis. John, qui était militaire et historien, a écrit un ouvrage militaire qui retraçait les exploits militaires de son père défunt. Il a écrit et terminé ce livre à La Reid. Dans sa version française, cet ouvrage s’appelait Opération Brouillard d’automne. Il décrit la Bataille des Ardennes ou Herbstnebel pour les germanophones. C’est à l’initiative du bourgmestre Jean Gillet qu’une allée a été nommée « Allée Brouillard d’automne » en souvenir du passage de John Eisenhower. Elle se situe entre Vertbuisson et Croix Papet.

Après la seconde guerre mondiale, en mai 1949, la Fédération nationale des Ex-maquisards de Belgique inaugurait une stèle afin de rendre hommage aux héros de la résistance et du maquis. On peut y lire Ici repose le Maquisard inconnu. Ce site unique en Belgique entre Marteau et la Reid est tombé en désuétude, remplacé dans les médias par les courses cyclistes ou motorisées (Côte du Maquisard) ou par un arrêt de bus scolaire (arrêt Maquisard).

Quelques artistes de La Reid :

Jacques Huydts (+) peintre, à Queue-du-Bois ; Didier Comès (+), dessinateur de BD à Winamplanche ; Marie Jeanne Weerts, peintre sur soie à La Reid ; Michel Barzin, graveur à Desnié ; Cyrille De Decker, peintre à Winamplanche.

BECCO

Ce village reidois était plus important avant La Reid (beckol en 1313, beko, beyco, becko en 1383 : bois de hêtres du germanique bok = hêtre et hulta ou holt = bois : comme les autres communes de Beho et Bocholt dans le Limbourg -Becco existe aussi en Suisse et dans le langage populaire italien). Ce gros village s’est agrandi avec ses hameaux et lieux-dits satellites : Hautregard, Verte-Fontaine, Bois Renard, Croix Colette, L’Ourlaine, Fagne Saint-Remacle et Ménobu. Promontoire naturel situé entre La Reid et Theux, ce village est connu pour ses constructions anciennes qui forment l’axe principal. Les habitants de Becco (les Beccotis) et les Reidois ne se côtoyaient guère, ils ne s’appréciaient pas beaucoup… Sans doute parce que le village était presque plus important que La Reid bourgeois et administratif ! Pendant la guerre scolaire d’avant 1914, deux écoles se faisaient face… l’une catholique et l’autre communale. Si les cafés et épiceries se font plutôt discrets, la vie culturelle est toujours animée. Citons les associations : Arts et Couleurs, « Le Réveil Matin » devenu le « Denier scolaire » puis le Comité des fêtes de Becco, qui organise la fête du village et d’autres activités destinées à ses habitants. Le village fête saint Éloi.

À la sortie du village, sur la route de Bois-Renard, une petite chapelle fut construite, après la seconde guerre, en mémoire du curé Kollmeyer et ornée d’une statue de la Vierge des Pauvres (appellation sous laquelle la vierge Marie s’est présentée lors de ses apparitions à Banneux en 1933). Aujourd’hui après une consultation populaire, le projet de nommer les rues de Becco est en bonne voie de se réaliser.

Hautregard et Belva : hameaux situés entre La Reid et la descente vers Remouchamps. Selon le cadastre de 1833, les meilleures terres agricoles étaient à Belva (Belvaux ou Belle Vallée) et Hautregard (dont la vue peut admirer de très haut le paysage). Ce site était historiquement lié à la construction du château et au domaine de la famille de Presseux. Sur la colline, le château de Hauregard (ou Hautregard) fut construit en 1620 pour Jacquemin de Presseux alors que son père occupait l’ancienne ferme ou château primitif des de Presseux à Jehoster dans l’actuelle Ferme de la Chapelle. Le domaine de cette famille était immense au-dessus de La Reid, y compris la maison de Verte-Fontaine. Le hameau de Hautregard abritait à l’origine les habitations des fermiers, gardes, domestiques employés de la famille de Presseux.

La Cense Bierleux, la grosse ferme du carrefour de Hautregard, était un comptoir douanier exploité par le premier de la famille Crahay de La Reid. Au-delà du carrefour et jusqu’en 1794, c’était une enclave du Duché de Luxembourg en territoire liégeois, avec Remouchamps et Aywaille comme lieux principaux. En face de la ferme, l’ancien hôtel Lambert (maison Boniver) a hébergé, avant 1914, les amateurs de chasses à courre et de courses de chevaux dont les participants étaient issus de la haute société.

En septembre 1794, la dernière bataille qui a opposé les Français révolutionnaires et les Autrichiens s’est déroulée en partie, et dans sa phase décisive, à Hautregard : elle est aussi appelée « Bataille de Sprimont » ou encore « Combat de Sougnez ». Après ce combat, nous sommes devenus sujets français pour une vingtaine d’années. Hautregard, Becco, Belva, Queue-du-Bois subirent toutes les exactions militaires à la suite de la débâcle autrichienne : la défaite était très amère pour eux, et les meilleures cultures céréalières étaient à Hautregard et Belva. Quelques traces de la bataille sont encore présentes à Hauregard tout comme le site de la Redoute au-dessus de Remouchamps, qui rappelle la mémoire de ce combat.

Belva était un hameau de cinq habitations (à présent huit) dont une ferme encore exploitée. Les habitants contribuaient, dans l’ancien régime, à entretenir le domaine de la famille des de Presseux.

DESNIÉ

Origine incertaine du nom. La plus ancienne désigne la foresterie d’Assegnées, en 1382, ou la Forêt du Seigneur, forest da segné mais peut-être aussi : asse+gnées comme Assenois ou Asse à Julémont pour asse, du germain astan = bois, branche et gnées = domaine de… ce qui correspond à la réalité puisque c’était un massif boisé qui appartenait aux seigneurs de l’époque.

Dernier village reidois qui s’est développé vers 1550 dans la fagne et les landes marécageuses vers Bronromme. Desnié n’a pas de centre ni de quartier. C’est l’altitude du perron de l’église de Desnié qui a désigné « Basse » et « Haute » Desnié. Si la terre était pauvre, la richesse venait de l’apiculture et des fruits à cueillir sur le haut du village.

Les Desniétois étaient des cueilleurs de myrtilles et d’airelles (les tchîntchîns) qui garnissaient les tables des touristes à Spa. Ils fabriquaient aussi les paniers en osier (les tchènas) en hiver, ce qui a donné le surnom des habitants : les tchèn’leus. Avant notre époque moderne, les touristes se précipitaient à Desnié pour admirer les cascades de Halteboeuf (plutôt halde bure = scories de minerai près des puits d’extraction : le wallon en a fait une halte pour des bœufs !) et son escalier de 110 marches qui longent le torrent. En été, ce torrent est à sec, les meilleures photos sont à prendre en hiver pendant la fonte des neiges. Mais ce site est pratiquement oublié des curieux car il est dangereux et difficile d’accès.

Au pied du site, s’étale la vallée de Tolifaz avec ses rochers et son menhir mystérieux (plutôt lire toli fault pour toli, teloneum = impôt, gabelle, imposer et fault = du germain falisa = falaise, rocher : rocher frontière qui désignait les limites des paroisses de Sart et Theux). Une seule maison dans un site majestueux naturel (maison à Mon Crasse dans la vallée de Fond Crasse). Le ruisseau de Winamplanche forme toujours la frontière entre les communes de Theux et Spa. L’ancien cimetière de Desnié a des particularités : cinq tombes de soldats du Commonwealth décédés en 1918 ; un monument spectaculaire, réplique du « Pavillon de la Reine Jeanne » aux Baux-de-Provence, érigé en 1915 par Gustave Trasenster, industriel liégeois. Le château de la famille Hayemal a été construit en 1868 à Fagne Maron, hameau de Desnié.

Ce village est le plus anecdotique et exotique de la commune de Theux. On y a vu des loups en fuite (1985) des wallabies et des nandous s’échapper de leur enclos, des couleuvres dans la vallée de Tolifaz, sans oublier le chemin du Congo qui n’est pas loin de la rue du Canada…

Dans le film de Dany Boon réalisé en 2013 (Eyjafjallajökull) où un volcan islandais bloque les aéroports européens, une séquence du film a été tournée dans la côte de Desnié (2 secondes) pour une séquence dans le film réalisé en Slovénie ! En 2006, c’était Micha Wald (Voleurs de chevaux) qui filmait, dans la cour de l’ancienne école de Desnié, des scènes pittoresques qui étaient supposées se dérouler en Russie en 1860. Dans les années 1960, le futur roi d’Espagne, Juan Carlos, invité chez le ministre Van der Schueren à Pré Mack, assistait à la messe dans l’église de Desnié.

Depuis 2005, Desnié a de nouveaux noms de rue. Le hameau aqualien (d’Aywaille) de Ville-au-Bois entre Stoumont et Desnié était rattaché à Desnié, pour le scolaire et le religieux. Il n’est pas rare à notre époque de croiser le facteur d’Aywaille à Desnié, venir s’égarer à Ville-au-Bois afin de livrer des colis postaux. Ce hameau fagnard a été celui d’une grande famille qui s’est établie après 1800 : les Mathias.

Avant 1900, cet endroit discret au-milieu de la nature a rapidement quintuplé sa population (environ 80) tous descendants des Mathias. Aujourd’hui le nombre d’habitants se compte sur une main. Les maisons de Mon Crasse, Croix Papet, Pré Mack, Vieux Pasay, Fagne marron, Banoyard et Bronromme sont rattachées à la paroisse de Desnié.

Dans la rue de Tolifaz, existe le « Centre de Tolifaz », ensemble d’ateliers pour les personnes handicapées adultes de l’Institut Saint-Michel de Spa. Les « Amis de Tolifaz », comité toujours très actif dans la commune de Theux, continue à organiser des activités afin de récolter des fonds au bénéfice des personnes de la « Ferme de Tolifaz », aujourd’hui « Centre de Tolifaz ».

Le « Chemin du Congo » est une particularité dans la toponymie locale. Selon une carte postale ancienne, c’est le dessus de ce chemin au carrefour avec le Vieux Pasay, qui désignerait le « Congo » de 1900. L’endroit était touffu, stérile à la culture, abandonné par la herde et proche de la savane, selon l’idée que se faisaient les Desniétois des découvertes au Congo ! Après une constatation rudimentaire, l’endroit fut appelé le Congo. Comme pour le Canada, les Desniétois auraient dit Nous aussi on a le Congo !

Bronromme : ou Bronrome : du gaulois bronnia = plateau et du vieux liégeois romer, roumi = ruminer plateau où le bétail rumine : c’était l’endroit de pâture de la herde stoumontoise, spadoise et reidoise. C’est le point le plus haut de la commune de Theux (525 mètres). À Bronromme c’est le bout du monde, dit-on ! Ce hameau est rattaché à la paroisse de Desnié ainsi que l’ancienne auberge ruinée d’Heure Gilson -en territoire spadois.

En 1875, Henri Peltzer créait une ferme industrielle modèle dans cet endroit fagnard. Le fumier était évacué par wagonnets manœuvrés par un contremaître et une trentaine d’ouvriers de laiterie. Après la cascade de Halteboeuf, les curieux affluaient en masse pour admirer cette ferme originale. On y dégustait le lait frais et la goutte, encouragés par la musique de la fanfare de La Reid… ou alors c’était le club de gymnastique de Theux qui se déplaçait en excursion. La Reine des Belges quittait Spa dans sa calèche et venait quelquefois rendre visite à Henri Peltzer, qui organisait aussi des courses de chevaux. Avant 1914, cette entreprise a fermé ses portes -faute de débouchés et de moyens rapides en hiver pour vendre la production.

Le plus étonnant de cet endroit, c’est le nom de la parcelle sur le plus haut point de la commune, à l’intersection des communes de Theux, La Gleize et Spa. Elle s’appelle « Fagne de Mahomet » (n°1 section C La Reid) ou « Parcelle du turc dit Mahomet » du surnom du propriétaire de 1650, « le Turc », car il venait du duché du Luxembourg, comme les habitants de Faymonville surnommés les Turcs.

C’est à Bronromme que s’est déroulé le dernier combat précédant la libération de Spa. L’Armée secrète et la résistance, cantonnées dans le Refuge du chevreuil, se retrouvent exposées aux tirs de l’armée allemande. Plusieurs braves tombent tandis que d’autres Belges des environs sont fusillés.

Depuis 1945, les représentants militaires et résistants commémorent les « Feux du Maquis » chaque année le 5 juin, veille du débarquement allié du 6 juin. Les « Feux du Maquis » représentent les balises enflammées pour faciliter le parachutage d’hommes et de matériel militaire. En 2015, cette représentation symbolique à côté du Refuge du Chevreuil est toujours dans les calendriers historiques.

Depuis 2005, la société Verlac exploite l’éolienne du plateau de Bronromme. D’autres projets éoliens sont toujours dans les tiroirs des promoteurs. Aujourd’hui le site de Bronromme est le lieu privilégié des promeneurs attirés par la nature sauvage de l’endroit. On y cueille toujours des fruits sauvages.

Hestroumont : hameau autrefois rattaché à la communauté de Becco, mais, depuis la construction de la voie Turon (ou Thuron du vieux français thure pour un cours d’eau rapide et tumultueux) en 1848 vers Remouchamps en traversant La Reid, le hameau est lié à la paroisse de la Reid. Hestroumont : mont aux taillis de hêtres (du germain haistr = hêtres et mont pour le relief). Ce hameau de quelques maisons était le lieu de résidence d’une famille illustre dans la finance, le commerce et la magistrature : la famille Malherbe citée au XVème siècle. Ils étaient connus à La Reid, Theux, Liège et en Allemagne. Ce hameau possède plusieurs maisons isolées à Sur les Trixhes, Fagne, Thuron, Grosthier, Masta, Carrière et Fancheumont. Ces deux dernières maisons (Ferme de la Carrière et Ferme de Fancheumont) possèdent des gîtes ruraux appréciés des amateurs d’endroits pittoresques. La Ferme de Fancheumont (maison sur la fange) est aussi une ferme pédagogique proposant des animations pour enfants tandis que la Ferme de la Carrière possède une salle dite du Géant qui rappelle la mémoire de Jean Antoine Bihin, dit le Géant Bihin (voir plus haut, à La Reid).

Historiquement, les alentours de Hestroumont ont été exploités au XVème siècle et au XIXème siècle pour l’extraction du minerai de fer. Plusieurs termes de la toponymie locale rappellent le passé industriel du hameau (Hez de Fer, Pré des Quatre Fosses, Pré de la Fosse).

Jehoster : hameau au-dessus de La Reid (ster = terre défrichée (de Jehan ?), mais le lieu mélange Jehoster et Hojoster = terre défrichée de Hojo ?). Ce hameau, tout en longueur depuis la Croix Papet jusqu’au hameau de Hautregard, est très ancien. Son nom en ster atteste d’une certaine ancienneté dont le premier habitat primitif se situe à l’endroit actuel de la Ferme de la Chapelle. Elle était appelée cense, ferme ou château de Presseux, construit en 1506 pour Englebert de Presseux, gouverneur du Marquisat de Franchimont. Ce domaine résultait sans doute d’un octroi d’Erard de la Marck, prince-évêque de Liège, en faveur de cette famille. Une chapelle (chapelle du Bon Air) fut construite en face de la ferme en 1671.

Ce hameau a été le lieu de naissance des deux familles les plus prolifiques de La Reid : les familles Gonay et Pirnay, dont les ancêtres ont construit et vécu à Jehoster aux alentours de 1600. Les premiers Gonay (Jacquemin dit Gonea) étaient des éleveurs de bétail devenus bouchers pour la plupart, tandis que les premiers Pirnay étaient des cloutiers (Pirnay le clut) puis entrepreneurs et maçons. Depuis une dizaine d’années le nombre de maisons a augmenté considérablement dans ce hameau.

Winamplanche, Marteau et les Digues: planche à Winand (peut-être une passerelle primitive pour passer la rivière), maka ou marteau Goffin, propriétaire d’un atelier sidérurgique dans ce hameau, les digues pour les retenues d’eau qui alimentaient les biefs des roues à aubes des ateliers métallurgiques.

Village theutois (ex-reidois) et spadois. C’est le ruisseau qui traverse le village qui forme la frontière entre les deux communes. Les maisons du lieu-dit Les Digues sont attachées à la communauté de Winamplanche-Marteau. Cette question du rattachement à Spa ou à Theux ne date pas de la fusion des communes ! Dans le passé, ce problème était récurrent à cause du moulin banal, bâti du côté spadois. Il s’agit d’un village ancien au passé métallurgique dont l’industrie s’est développée jusqu’au XVIIème siècle. De Spa à Pepinster et de Jalhay à Theux, la Hoëgne et ses affluents alimentaient les biefs qu’utilisaient les roues à aubes des ateliers métallurgiques. Toute cette industrie métallurgique est à la base de l’installation de la sidérurgie dans le bassin liégeois.

Les habitants du village spado-theutois ont connu quelques dramatiques événements durant les dernières décennies. En septembre 1944, une colonne SS traverse le village et ses sbires abattent quatre hommes. Et, avant de quitter Winamplanche, la troupe allemande incendie douze maisons, dont six du côté spadois. En 2015, les traces de ce drame sont toujours visibles dans l’architecture des maisons incendiées. Chaque année, aux alentours du 10 septembre, a lieu la commémoration de ce drame barbare. En août 1969, le centre du village était inondé suite aux intempéries nombreuses.

Le premier comité de cette entité, de création paroissiale, s’appelait « Société Sainte-Cécile ». Un autre le remplaçait en 1947 suite à la tragédie de Winamplanche de 1944. Mais c’est en 1977, suite aux tracasseries des fusions des communes, qu’un nouveau comité s’est créé : l’actuelle « Association villageoise de Winamplanche-Marteau ». Bientôt quadragénaire, ce dynamique comité expose annuellement un programme festif alléchant (Grand Feu, Marché aux Fleurs, vols en Montgolfière, Fête du Village en août, visite de saint Nicolas, etc.).

Le hameau de Marteau est le lieu reidois qui a subi le plus de transformations pendant les périodes modernes. Ce sont les deux rivières qui délimitaient les côtés theutois, reidois et spadois avant 1977. En 1768, la voie de grande communication Liège-Malmedy était créée en passant par Theux, Spixhe, Marteau et Spa. Le tracé de l’avenue de Spa date de cette époque. Il y avait peu de maisons (environ 4) avant le tracé du chemin de fer (1855) mais plusieurs bâtiments industriels, ateliers et moulins. La pose du rail a définitivement supprimé quelques maisons et les ateliers qui appartenaient à la famille Cockerill. Le pont à côté de la pompe à essence se nommait « Pont Cockerill » avant la pose du rail.

En mai 1940, le Génie belge dépose des mines qui exploseront et qui endommageront presque toutes les maisons de Marteau (côtés spadois, theutois et reidois). En 1944, les Allemands font exploser les voies de communication de ce carrefour routier, défigurant ainsi le hameau. Enfin, en 1978, une nouvelle voie industrielle relie Marteau et l’usine de Spa Monopole. À présent, le hameau est un carrefour autoroutier.

Vertbuisson : verd bouhon : nom d’une ancienne enseigne de relais-taverne. C’était une grosse habitation avec ses dépendances agricoles et sa brasserie, en forme défensive de quadrilatère. À deux pas des étables, la Vecquée (voie de l’évêque) et la Porallée (pour aller autour, du latin : perambulatio) terres si convoitées, ont provoqué jadis des guerres sanglantes entre les Reidois et ceux de Remouchamps de l’enclave luxembourgeoise.

La Vecquée était le chemin de grande communication du moyen-âge pour se rendre de Liège à Stavelot. Elle séparait les pays franchimontois, luxembourgeois et stavelotains. La Porallée miraculeuse était une sorte de no man’s land entre Vertbuisson, hameau reidois, et Sedoz, Nonceveux, hameaux luxembourgeois, convoités par tous pour la pâture et le bois.

C’est un hameau verdoyant, niché au milieu de la forêt parsemée de landes marécageuses. En hiver pour celui qui s’égarait, Vertbuisson était le hameau providentiel permettant de retrouver son chemin.

Le centre du hameau n’a pas changé depuis quelques centaines d’années. À présent, ce sont des groupes de marcheurs qui démarrent leur journée pour se diriger vers la charmille ou vers le Ninglinspo. En décembre 1944, cinq artilleurs américains trouvaient la mort à côté de leur machine de guerre. André Andries, écrivain, magistrat et historien, habite le hameau depuis 1966. Plusieurs de ses ouvrages, relatant la vie d’autrefois des Reidois, ont été édités par le Syndicat d’initiative de La Reid.

Jean-Luc Seret, 2015